On oublie souvent à quel point les rappeurs réunionnais sont nombreux. Né sur l’ile ou y ayant grandi, chacun a eu une expérience différente qui a pu inspirer pas mal d’artistes. Et c’est pour ça que notre rap local a autant de facettes. Avec ce projet, Mussy nous en montre une nouvelle. Aujourd’hui on s’attaque à son album solo : JIG. Attach’ ceinture parce que le décollage risque d’être assez intense.
De la Réunion vers le 69.
Sorti le 29 juin, JIG est donc le premier projet solo dans la carrière de Mussy. Également membre du groupe Saturn Citizen et rappeur du collectif Lyonzon, Mussy est déjà bien connu de la scène underground. Mais pour ceux qui l’ont peut-être raté, une présentation s’impose.
Né en Belgique et d’origine rwandaise, Mussy s’installe dans sa jeunesse à la Réunion et plus précisément dans le sud à St-Pierre. Ayant découvert le rap US assez tôt, Mussy continue de développer son style et son intérêt pour le rap sans vraiment sortir de projet ou de hit. Mais dans la vie certaines rencontres peuvent tout changer. C’est ainsi qu’au collège, avec le rappeur Bushi, ils créent le groupe Saturn Citizen. Un premier crew qui rien qu’avec le nom nous démontre à quel point les deux artistes veulent prendre de l’altitude.
Le groupe s’agrandira plus tard avec l’arrivée de Azur qui finira par se séparer du groupe le 1er avril 2020. Une époque où Mussy est assez actif avec Saturn Citi, mais cela ne l’empêchera pas de réfléchir à son futur et d’affuter ses armes. Le moteur commence à chauffer.
Le groupe, ainsi que la carrière de Mussy commencera à prendre une autre tournure lorsque les rappeurs s’installent à Lyon. En effet, la rencontre avec Gouap viendra marquer l’intégration de Saturn Citizen au collectif Lyonzon. La technique de Mussy lui permet rapidement de s’affirmer dans le groupe. Il fait une belle apparition sur le freestyle Arah 3 où il nous démontre toute sa motivation. Ça se passe à partir de 4 min 44 s.
Une virée avec Mussy au volant.
Pour son premier projet, Mussy a pris les choses en main. Pas de featuring, juste lui qui kick sur les 10 morceaux de l’album. Derrière les prods, on retrouve sur pas mal d’entre elles le beatmaker Schumi1. Une belle occasion pour Mussy de démontrer son potentiel autour d’un vrai projet solo. Et pour le coup il ne l’a pas raté. Il s’assume complètement et on rentre facilement dans son univers. Il arrive à reprendre l’ensemble des codes du rap et de la trap, mais il y ajoute une touche qui va nous surprendre. On sent que le rappeur maitrise ce qu’il fait et qu’il peut se permettre de sortir des sentiers battus.
Il s’exerce à des schémas d’écriture vraiment intéressants et le résultat colle parfaitement à la prod. Sur le premier son notamment, Allié, Mussy s’amuse à mélanger différentes dispositions de rimes (sur les rimes croisées et plates notamment) qui viennent vraiment dynamiser son texte et donner du poids à ses paroles souvent sombres. Une dynamique que l’on va retrouver assez souvent dans ce projet. De toute manière il nous prévient dans son refrain :
« J’griffe sur mes cahiers (ouah), j’suis pressé t’as pas idée. »
Écrire pour expier. C’est aussi une grosse facette de JIG. Même si les prods et les flows diffèrent au fil des chansons, nous avons une ligne directrice assez sombre qui demeure. Personnellement j’ai vu cet album comme un moyen de raconter une histoire. L’histoire de Mussy. Pendant cette virée plus qu’effrénée, le rappeur nous fait voyager parmi ses différents états d’âme. Sur les relations humaines, sur le rap game, sur la vie. Une vision qui parait assez dark parfois, mais qui au fond permet d’y ressortir quelque chose de positif. Sur ce point Mussy me fait quelque peu penser à Josman. Un rap vénère diront certains, mais plutôt un rap engagé. Sur les lyrics oui, mais surtout sur l’investissement dans la musique.
Même si Mussy donne de l’importance à son écriture, il amène aussi une grosse dimension de turn up. Grâce à ses inspirations du rap US, le jeune rappeur réunionnais maitrise bien les codes de la trap et prend plaisir à kicker dessus. Il développe une grosse énergie, qu’on avait déjà pu voir dans les clips de LyonZon, mais qui se confirme réellement ici. Pour l’instant il n’a pas réalisé de concert solo mais c’est clair qu’on ne serait pas déçu.
« J’suis plutôt discret, t’étonnes pas qu’j’fais d’la peu-fra
C’est ma décennie donc j’me permets enfin de montrer ce que j’ai dans mon ce-sa »
JIG est un premier projet bien maitrisé, qui promet de bonnes choses pour la suite. On sent que Mussy pourrait nous emmener sur des horizons vraiment différents. Partir sur des thématiques et des prods nouvelles afin de ne pas tomber dans un cycle néfaste qui parfois peut nuire à l’inspiration. Et ça Mussy l’a bien compris et c’est pour ça qu’il risque de continuer à être actif dans l’avenir. Autant en solo, qu’avec Lyonzon, qui ne cesse de prendre de l’ampleur dans le game francophone. La route est encore longue certes, mais avec ce projet Mussy est clairement prêt pour la rider jusqu’au bout.
Un artiste à suivre pour ceux qui le découvrent et qui promettent de faire parler de lui. Et vous comment avez-vous trouvé ce premier album ?
Le Billzer
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